Réflexions

La Poudre

Crédit : Eva Byele

La Poudre, c’est d’abord une voix. Une voix belle, douce, suave, une voix féminine. C’est celle de la journaliste Lauren Bastide. Pendant une heure, la journaliste, intelligente et bienveillante, donne la parole à des femmes de toutes origines, confessions, orientations sexuelles, qui sont artistes, activistes, politiques…

Elle leur pose des questions sur leur enfance, leur parcours, leurs combats et leurs idées. « Comment sont-elles devenues féministes, comment habitent-elles leurs corps de femmes ? » Toutes ces questions que l’on n’entend jamais… Tous ces parcours de femmes qui ne sont jamais relatés ainsi avec profondeur, nuance et force.

Il y a quelques mois, l’une de mes amies m’a dit : « Tiens, écoute ça, c’est pour toi, des podcasts féminins ! » Cette amie a fait partie du projet scénique Écrivaines, que j’ai créé il y a un an et demi, qui a pour but de rendre hommage aux femmes écrivains.

Je voulais faire entendre les voix de ces femmes d’hier, les faire résonner dans nos vies et les mêler à de nouvelles voix, celles de femmes auteures d’aujourd’hui. Et voilà que cette amie me parle des podcasts La Poudre ! Or, des podcasts, ce sont d’abord des voix !

Je me suis mise, le soir, à écouter les émissions. Chaque nouveau podcast était, en fait, un rendez-vous avec moi-même. Chaque parcours que ces femmes livraient me renvoyait au mien, me faisait m’interroger sur ce qui m’unissait à ces femmes malgré des différences sociales, religieuses, ethniques ou sexuelles.

Je me rendais compte que plus je les écoutais, plus je me sentais proche d’elles. Moi qui avais passé ma vie à chercher des modèles féminins dans les livres, dans les héroïnes de romans, dans les écrivaines, philosophes, artistes que je lisais ou dont je lisais la vie, je prenais conscience que, grâce à La Poudre, je pouvais puiser ma force, mon courage pour continuer mon combat, dans mes concitoyennes, dans mes contemporaines.

Je croyais jusqu’alors que c’était impossible. Grâce à ces podcasts, je me suis rendue compte du contraire. En fait, malgré les différences, j’étais « comme » elles ; les raisons qui avaient fait que j’étais devenue féministe étaient semblables. Et si nous nous battions, chacune, dans notre domaine, c’était en fait dans les mêmes buts.

Car c’est parce que l’on est humaniste que l’on est féministe. C’est parce que l’on est empathique que l’on est féministe, c’est parce que l’on est doté de libre arbitre que l’on est féministe, c’est parce que l’on est un être intelligent que l’on est féministe, c’est parce que l’on est un être plein de sensibilité que l’on est féministe.

Et c’est parce qu’on a la conviction que les hommes et les femmes sont nés et demeurent égaux, que, pour cela, il faut se battre pour les droits des femmes. Les femmes représentent la moitié de l’humanité, les droits pour les femmes représentent donc l’un des plus grands enjeux du XXIe siècle !

Certes, il y a d’autres enjeux également essentiels comme la faim, la misère, qu’il faut éradiquer, les maladies contre lesquelles il faut lutter et qu’il faut apprendre à traiter… L’écologie qui représente un immense défi, l’éducation, qui est une nécessité absolue, le terrorisme qui gangrène les hommes et qu’il faut endiguer. Mais le combat pour le droit des femmes nécessite toutes les initiatives, pensées, recherches, aides collectives…

Ce que permettent ces podcasts, c’est de donner davantage confiance aux femmes. Pourquoi ? Parce qu’elles se rendent compte que les difficultés auxquelles elles sont confrontées sont les mêmes que celles de leur voisine. Sauf qu’il y a une double lutte si les femmes sont issues de minorités religieuses, ethniques ou sexuelles. C’est pourquoi le féminisme doit être intersectionnel !

En entendant le combat d’autres femmes et comment elles ont trouvé les ressources pour s’en sortir, aller de l’avant et devenir elles-mêmes féministes en luttant par la politique, l’humour, le militantisme, l’art, cela renforce le courage des autres femmes.

La Poudre, par son initiative permet donc deux choses essentielles : l’empuissantement et la sororité. L’empuissantement car elle montre comment d’autres femmes se sont battues pour ne pas être ou rester les victimes qu’on leur demandait d’être, des femmes soumises qui devaient se plier à un joug établi par la société.

La sororité parce qu’elle célèbre ce qui nous unit. Comme dit l’artiste Océanerosemarie dans l’une des émissions : « si être femme, c’est être féminine et donc être empêchée, non merci. Être femme, ça doit être la liberté de tous les possibles ! » Eh bien, faisons en sorte, ensemble, que le combat des femmes soit celui-là, celui de la liberté de tous les possibles, sans penser aux injonctions d’une féminité sclérosante ou empêchée.

Être femme est une richesse extraordinaire, une chance extraordinaire, nous sommes d’une sensibilité, d’une intelligence, d’une imagination, d’une ressource intérieure, d’un courage immenses.

Nous avons été dotées de toutes les facultés pour vivre pleinement notre vie. À nous d’imposer notre manière d’être au monde et de devenir des modèles les unes pour les autres !

Réjouissons-nous enfin quand notre sœur, notre amie a réussi car sa réussite est notre réussite. Soyons des sœurs les unes pour les autres et non plus des femmes isolées comme on nous a enseigné à l’être pendant tant de temps. Unissons nos forces et nos intelligences ! Soyons ensemble, enfin !